Gérardmer 2006

 

C’est seulement quelques jours avant le début de la treizième édition de Fantastic’Arts que nous apprenons fébrilement la projection de notre court-métrage « Friday the 12th » dans le cadre du festival international du film fantastique de Gérardmer. Depuis le temps qu’on se disait, en tant que grands fans de fantastique (gore, épouvante, horreur), qu’il faudrait monter un jour à Gérardmer pour voir ce que ça donne, voilà une occasion qu’on ne pouvait décemment pas manquer !  

 

29 janvier 2006. 6 heures du matin. – 12 degrés. Quelque part à 400 km de Gérardmer. C’est accompagné de mon fidèle (et néanmoins ami) Miguelito (Christophe BRUNET) que le périple commence. La fatigue est là (on a eu l’inconscience de regarder jusqu’à deux heures du matin la veille le gros blockbuster niaiseux qu’est « Les quatre fantastiques ») mais l’excitation est à son comble : nous serons projetés la journée sur le même écran qui va accueillir quelques uns des plus grands noms du fantastique : John CARPENTER, Joe DANTE et Tobe HOOPER…

 

                   
 

Nous arrivons donc quelques heures plus tard à Gérardmer… On s’attendait naïvement à découvrir une petite station de ski conviviale mais il n’en est rien : Gérardmer est une véritable ville nichée dans la montagne ! On se rend sans trop de peine au cœur de la manifestation : la place du Tilleul est remplie de petits chalets proposant diverses joyeusetés des artisans ou commerçants locaux. En face de la place se trouve le grand Hôtel qui accueille toutes les personnalités du festival et autres membre du jury. C’est sous le regard (pas forcément connaisseur) de quelques badauds agglutinés devant les barrières de sécurité que l’on peut apercevoir au loin les visages d’Hideo NAKATA ou de Sam KARMAN.  

 

Après avoir balancé à la hâte nos affaires à l’hôtel (en face du grand hôtel, modestes moyens oblige !) on se précipite au cinéma PARADISO qui projette « Dance of the Dead » de Tobe HOOPER, premier épisode de l’anthologie « Masters of Horror » que diffuse le festival.On arrache au passage le Petit Fantastique (le quotidien du festival) à l’un des 600 bénévoles qui oeuvrent pour Fantastic’Arts et nous sommes étonnés de voir nos noms apparaître dans le journal avec un article mentionnant la projection des courts vidéos du festival. Voir Presse

On découvre donc après une longue queue (qui s’achève avec une distribution gratuite de Bretzel et de glaces délicieuses) la belle salle de 350 places dans laquelle sera projeté notre film l’après-midi même. On ne le savait pas encore, mais on était également sur le point de voir le meilleur film qu’il nous sera donné de voir durant cette journée. Tobe HOOPER est revenu au meilleur de sa forme (moi qui croyait qu’il s’était endormi sur ses lauriers depuis Poltergeist et son inoubliable Massacre à la Tronçonneuse) et son film, malgré quelques longueurs romanesques inutiles, nous offre des scènes réellement gores et violentes  entrecoupées par des apparitions de Robert « Freddy » Englund qui cabotine un maximum. Un régal pour les yeux !

 

Une fois la projection finie, le téléphone sonne. Laurent GONEL (qui présente également ses films), un des grands habitués du festival, nous invite à boire une bière dans l’un de ses nombreux repères. Je ne l’avais jamais rencontré « en live » mais on avait pris contact et correspondu par mail depuis que nos films respectifs avaient été projetés au deuxième festival gore de Dunkerque. On parle bien évidemment fantastique, Lolo nous présente son nouveau projet (Sex Trek, une parodie de Star Trek), bref on refait le monde... Le temps passe et voilà qu’il faut déjà penser à se rendre à nouveau au PARADISO où nos œuvres vont subir les foudres de la critique d’un public connaisseur… On passe néanmoins vite fait à l’Espace Tilleul, véritable cœur du festival, où nous achetons quelques billets pour les films de fin de soirée et récupérons David SHERER (que j’avais déjà pu rencontrer au festival Ose ce court de Bischheim), un grand habitué également du festival sur lequel il tient un stand de maquillages…     

 

                     

 

Ni une ni deux on se précipite au PARADISO, Christophe a revêtu entre temps son costume de Miguelito… Alors que la salle se remplit, les séances photos débutent… Le public se détend et apprécie incontestablement  la présence des réalisateurs et de Miguelito, la véritable mascotte de la séance. Plusieurs réalisateurs ont fait l’effort de se déplacer pour l’occasion. Parmi eux on citera Olivier NELLI (Spirit), Laurent GONEL (L’alimentoïde, Zofirax), Pascal COSSARDEAU (Une si douce mélodie) et donc moi-même : Rodolphe BONNET (Friday the 12th).

 

                   

 

Le public a l’air en forme, je m’improvise donc chauffeur de salle et recrute dix charmantes créatures dans l’assistance pour se faire prendre (en photo) avec Miguelito. Plusieurs veinardes se précipitent et prennent la pose aux cotés de la star en rose. Ces dernières se voient chacune remettre en guise de remerciement le DVD Gerbilles Productions 2005 qui regroupent tous nos courts-métrages. La salle continue de se remplir, l’excitation grimpe. J’en profite donc pour tenter de créer un évènement sans précédent au festival : obtenir une standing ovation du public avant même la projection des films (et ce pour saluer la présence et le travail passionné des réalisateurs présents). Le public se lève alors unanime et nous fait une salve d’applaudissements qui restera je pense un grand moment d’émotions pour nous autres petits réalisateurs au demeurant très modestes.

 

                   

 

 

Une fois la salle chauffée et le public confortablement installé, la séance débute… Quelques personnes se retournent et prennent Miguelito en photo. La bande à Laurent GONEL se trouve dernière nous et assure les « Oh-oh-oh » et autres « Aaaargh » de circonstance. C’est après « Wong » (un court « asiatique » surfant sur la vague « Usual Suspects ») et « Une si douce mélodie » narrant le destin tragique d’un homme voué à découper en morceaux certaines personnes qu’il rencontre qu’est projeté « Friday the 12th ». Le logo Gerbilles Productions apparaît sur l’écran, j’en profite alors pour le prendre en photo (pour la postérité). Le premier cliché est raté, le deuxième flou… Je tente de m’appliquer et prend une troisième, quatrième et même cinquième photo (toutes médiocre au demeurant). Je me retourne quand même car je me dis « Merde, c’est bizarre, il reste quand même longtemps ce logo !) et je vois Cédric JEANSON (le responsable du cinéma) me demander du haut de sa cabine de projection si j’avais fini de prendre mes photos et s’il pouvait lancer le film ! Sympa de sa part…

                    

 

Bizarrement, et contrairement à certains festivals auxquels j’avais pu participé, je ne ressentais aucun trac avant la projection de Friday. J’étais à peu près sûr, peut être à tort, que ce film allait recevoir un accueil plutôt favorable et ce pour deux raisons : un, ce film avait remporté le grand prix de la Gore Night 2 à Dunkerque en déclenchant des crises de fous rires dans la salle (dixit Laurent GONEL qui était présent à cette soirée), ce qui était donc bon signe ; deux, une soirée spéciale Vendredi 13 avait eu lieu la veille (trois des onze films ont été diffusés), aussi certains fans de la saga la plus prolifique de tous les temps étaient venus par curiosité voir ce que pouvait donner un film qui portait le nom « Friday the 12th ». Il n’a fallu que quelques secondes pour m’assurer que le public était en phase avec l’esprit du film avec les premiers rires déclenchés durant la scène d’introduction lorsque l’écervelé Billy croit qu’il va pouvoir coucher avec la jeune pucelle Meg. Et c’est parti pour 29 minutes de délire et de rires, l’apothéose étant l’hilarité générale du public lors de la scène durant laquelle Miguelito attaque Jason avec son godemiché. Plusieurs spectateurs viendront nous féliciter à la fin de la projection, certains nous avouant même avoir préféré notre film aux courts-métrages présentés en compétition officielle le matin même. Ca nous a fait sacrément chaud au cœur ! Pour la peine, ils repartent également avec un DVD…

 

La séance des courts vidéo terminée, on ressort et re-rentre vite dans le cinéma pour assister aux projections de deux autres épisodes des « Masters of Horror » : « Cigarette Burns » du grand John CARPENTER (Halloween, Fog, New-York 1997, Le prince des Ténèbres) qui nous a refait à mon avis une deuxième version de l’Antre de la Folie qu’il avait réalisé des années plus tôt. Et puis vient « HomeComing » de Joe Dante (Gremlins, Les Banlieusards), sans doute celui qui a été le plus apprécié par le public, mais qui à mon goût était pourtant le plus faible des trois : des soldats américains morts durant la guerre en Irak (ce n’est pas dit mais c’est explicite) sortent de leurs tombes pour aller voter et ainsi changer de président. Même si l’ambition est louable, DANTE oublie de faire du fantastique et nous délivre un message idéologique bien moins percutant qu’un « Fahrenheit 9/11 » par exemple.

 

 

   Le cinéma PARADISO     

      Le cinéma MCL

 

                                            

Ca y est, on sort, il fait nuit. Avant de se rendre au cinéma du CASINO pour les séances (payantes cette fois-ci) de « Fog » et « Sheitan », on s’arrête dans une petite pizzeria de la ville pour manger un sandwich à la va-vite. On retrouve par hasard trois spectateurs présents lors de la projection de Friday, des nouveaux fans avec qui le dialogue s’instaure rapidement. Les coordonnée s’échangent et on comprend à demi-mot dans la conversation que les spectateurs ont adoré pouvoir discuter et interagir avec les réalisateurs ou acteurs vu que malheureusement les seules séances où les « célébrités » sont présentes sont pratiquement inabordables (elles sont prises d’assaut par les journalistes et invités prestigieux du festival). Enfin, ils s’en iront quand même heureux, (certes avec un DVD, mais surtout) parce qu’ils auront eu l’occasion au détour d’un magasin de souvenirs de rencontrer fortuitement Hideo NAKATA, le président du jury et néanmoins grand réalisateur (Ring, Dark Water).

 

Le cinéma du CASINO

Le cinéma de l’Espace Lac

          

On se rend ensuite au cinéma du CASINO pour assister à la projection de « Fog », le remake. C’est la fin du festival, la remise des prix a eu lieu, et pourtant le doute s’installe : pourrons-nous assister à la projection ? En effet la lutte des classes commence : comme on est venus que pour la journée, nous n’avons achetés que des pass « séance » et non « Week-End » ou « Festival ». Donc ceux qui sont sûr de rentrer dans les salles ne sont pas ceux qui arrivent le plus tôt mais ceux qui ont achetés les pass les plus chers. Donc on poirote trente minutes, on voit les gens sortir de la projection précédente et revenir tranquillement dans la queue en passant par la file des privilégiés… Environ quatre cent personnes nous passent donc devant et on sent le coup fumé (surtout que les billets ne sont pas remboursables). C’était sans compter que l’on ne connaissait pas la salle du CASINO : somptueuse et  véritablement immense ! Il restait au moins trois cent places libres. Ouf ! Une petite voix dans le micro nous annonce le grand prix du festival : « Isolation » suivie de quelques applaudissements fébriles mais d’une pléthore de « Ooooohhhh ! ». A priori le film ne fait pas l’unanimité chez les spectateurs. On s’en fout un peu, on l’a pas vu. Nous on est là pour Fog ! On en gardera d’ailleurs pas un souvenir impérissable cela dit. Film conventionnel avec ses quotas de scènes chocs respectables... La surprise viendra un peu plus de « Sheitan » qui aura le mérite de ne pas laisser le spectateur indifférent. On aime ou on n’aime pas. Bon moi j’aime pas, mais j’ai quand même apprécié certains passages du film, notamment la fin qui part dans le portnawak le plus absolu mais qui propose (au bout du compte) des scènes violents filmées de façon très réaliste. Vincent CASSEL (présent deux jours plus tôt sur le festival) sauve le film grâce à son interprétation déjantée et son charisme qui n’est plus à démontrer. Le fossé entre lui et les jeunes acteurs du film est énorme mais qu’importe… 

 

Une heure du matin. On discute encore sur le parking avec notre ami Lolo GONEL et sa charment compagne. Une poignée de mains, quelques attouchements et on se sépare... Le rendez-vous est pris pour l’année prochaine. Complètement éclatés par une journée riche en émotions, on rentre à pieds avec Miguelito à l’hôtel. Bien entendu on se perd et on arrive une heure plus tard après de longues et inutiles déambulations dans Gérardmer.

                   
 

Lundi 30 janvier 2006. On se lève. On déjeune. On se casse. On en profite néanmoins pour acheter quelques babioles en souvenir (ça sert aussi à ça Gérardmer : développer le commerce et le tourisme) et surtout pour aller marcher sur le lac entièrement gelé ! Certains font du patin à glace, d’autres même de la planche (à ski) à voile… Enfin on n’était pas bien fiers non plus quand des craquements sourds ont retenti sous nos pieds ! Après cette dernière bouffée d’oxygène on reprend nostalgiquement la route…

 

Le 13ème festival international du film fantastique de Gérardmer (88) se sera donc déroulé du 25 au 29 Janvier 2006 et aura accueilli près de 30 000 spectateurs. Un succès à priori sans précédent et une certitude : il y aura bien une quatorzième édition en 2007.

 
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